Roland Ratzenberger : le rêve (brisé) d’une vie
1er mai 1994. Ayrton Senna est installé dans le baquet de sa Williams alors en pole position sur la grille de départ du Grand Prix de Saint Marin ; troisième manche du championnat du monde de Formule 1.
Non casqué, ce qui n’est pas habituel pour lui, le Brésilien est visiblement pensif.
Il faut dire qu’une atmosphère pesante règne sur le circuit italien depuis les essais marqués par l’accident spectaculaire de Rubens Barrichello.
Si le compatriote de Senna s’en est miraculeusement sorti indemne, ce n’est pas le cas de l’Autrichien Roland Ratzenberger décédé lors des qualifications le jour précédent.

Lorsqu’il arrive à Imola, Roland Ratzenberg a presque 34 ans, le même âge que Senna. Mais là où le triple champion du monde participe à sa 10ème saison au plus haut niveau, Ratzenberger lui ne prend part qu’à son troisième Grand Prix et espère bien se qualifier pour la course au volant de sa modeste Simtek.
Si au vu de son arrivée tardive dans les paddocks du grand cirque, l’on pourrait se dire que Roland est un énième pilote payant comme la F1 en voit passer régulièrement c’est loin d’être le cas, au contraire.
Sa présence en Formule 1, l’Autrichien la doit à son palmarès loin d’être ridicule et à sa volonté sans faille. Quand il se lance en sport auto, ce n’est pas le caprice d’un gosse de riche mais bien par passion. Les Ratzenberger ne sont pas fortunés et les parents de Roland ne voient pas d’un très bon œil l’engouement de leur fils pour les sports mécaniques même s’ils ne l’empêcheront jamais de s’y adonner.
C’est à 16 ans que le natif de Saltzbourg s’offre son premier kart avant de s’engager en Formule Ford à partir de 1983. Deux ans plus tard il remporte les championnats allemands, autrichiens et européens de la catégorie et s’impose lors du Formula Ford Festival. Félicité par Johnny Herbert, qui l’avait battu l’année précédente, les deux hommes parlent de leurs rêves de Formule 1. Si le Britannique fera le grand saut en 1989 chez Benetton, Ratzenberger lui devra patienter quelques années de plus.
En 1987 il remporte la course des champions et est engagé dans le championnat du monde de tourisme par BMW. Son premier vrai contrat. En parallèle il parvient à trouver de l’argent pour rouler en F3 puis en Formule 3000. Il terminera 3ème du championnat britannique en 88 et 89. C’est également en 89 qu’il prend pour la première fois le départ de la mythique épreuve des 24 heures du Mans. Une course à laquelle il participera à 5 reprises et qu’il terminera à la cinquième position en 1993.
En 1990, il rejoint le championnat d’endurance japonais. C’est là qu’il se fera une petite réputation au point de réussir à s’assurer le soutien de sponsors locaux afin de signer un contrat en Formule 1 au sein de la petite écurie Simtek pour la saison 1994.



Simtek qui débute elle aussi dans la discipline même si elle gravite autour du petit monde des Grand Prix depuis quelques années déjà. En 1990 c’est vers Simtek Research que BMW se tourne pour produire un châssis en vue du retour de la marque allemande en F1. Le projet sera abandonné et c’est finalement Andrea Moda qui alignera la S192 modifiée pour la saison 92. Un échec puisque la monoplace ne se qualifiera qu’une seule fois en onze participations. Pour 93 Simtek s’associe au projet 100% espagnol Bravo F1 mais qui ne verra finalement jamais le jour. Bref pour 1994 la structure s’engage en son nom propre et aligne un duo composé de David Brabham et de Roland Ratzenberger qui dispose alors d’un contrat pour les cinq premiers GP seulement.
Les débuts sont difficiles pour Ratzenberger qui ne parvient pas à se qualifier pour la première manche de la saison, au Brésil. Lors du Grand Prix du Pacifique, disputé sur le circuit de Aïda, au Japon, l’Autrichien parvient à rallier la grille de départ en 26ème et dernière position. Il était alors le seul pilote à avoir déjà couru sur ce tracé, en tourisme japonais.
Vient ensuite Imola et des problèmes de freins sur la monoplace numéro 32. Dans le brouillard, l’écurie demandera à Brabham de prendre le volant afin de coroborer les dires de l’Autrichien. Ce qu’il fera.
C’est donc avec de nouveaux freins que Ratzenberger s’élance pour la séance qualificative en ce samedi 30 avril 1994. Malgré une erreur à Aqua Minerale qui endommage légèrement son aileron avant, il ne repasse pas par les stands et continue son effort pour tenter de se qualifier. Mais à l’approche de la courbe Villeneuve, le dit aileron se décroche et passe sous la S941 qui va percuter le mur de béton à plus de 300 km/h. Ratzenberger meurt sur le coup.
Une disparition qui sera éclipsée par la mort de Senna le lendemain. Le Brésilien qui avait embarqué un drapeau autrichien dans sa Williams afin de le brandir symboliquement en cas de bon résultat.
Le 7 mai 1994 Ratzenberger est inhumé à Saltzbourg. Peu de gens de la Formule 1 ont fait le déplacement. Parmi les gens venus se recueillir, on compte une poignée de pilotes : Herbert, Brabham, Frentzen ou encore Berger auxquels s’ajoute Max Mosley alors président de la FIA. Celui qui avait co-fondé Simtek researsh en 1989 a préféré rester en Europe rendre un dernier hommage à l’Autrichien plutôt que de se rendre à Sao Paolo pour les funérailles nationales d’Ayrton Senna.
Ratzenberger/Senna, voilà deux pilotes qui n’avaient rien en commun et qui depuis 31 ans sont irrémédiablement liés par un des week-end les plus sombres de l’histoire de la Formule 1.
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